La Mode Ethique et nous...

Mode Ethique : où en sommes-nous, Nous ?

Alors que j'écrivais un article pour vous faire partager ma rencontre d'avant-hier avec la distributrice de la marque Greenality, un débat a refait surface et plein de questions me sont venues à l'esprit. Je pose donc tout cela dans un post d'humeur rapide (ou moins rapide). Bien-sûr n'hésitez pas à donner votre avis car en aucun cas je ne m'estime assez spécialiste pour émettre des propos définitifs au sujet du Commerce Equitable et de la Mode Ethique. Je pense que de nos jours, le Commerce Équitable, plus particulièrement la Mode Ethique, et leurs préceptes sont connus de tous. Je ne vais donc pas écrire un roman sur "pourquoi la Mode Ethique pourrait avoir une place encore plus privilégiée dans le monde de la mode"... 


Collection Lina Lhu.

A ce jour, le Commerce Equitable, en général, connaît une croissance en déclin. La faute à la crise économique, me diriez-vous ? Peut-être que cela joue car le prix est pour certains un facteur plus déterminant que la qualité. Le débat en matière de mode éthique tourne en effet  souvent sur le même sujet : le prix. La plupart des gens trouvent les produits issus du Commerce Equitable trop chers...  Hors en écrivant l'article d'hier, j'ai bien spécifié que la marque Greenality se positionnait au même niveau que ces concurrents "streetwear classiques" en termes de prix. Et ceci n'est pas un cas isolé; les marques de  Mode Ethique ne sont pas spécialement plus chères que d'autres marques. Néanmoins, la notoriété des marques Mode Ethique est moindre... Alors pourquoi est-ce que la mode éthique rencontre-t-elle malgré tout tant de difficultés ? Est-ce que cela vient de nous, acheteurs ? Nous sommes aujourd'hui des "consom'acteurs" alors quel rôle souhaitons-nous jouer ? Celui du consom'acteur qui croit tout savoir et qui négocie sans cesse avec les marques tout en cherchant la petite bête ? Celui qui attend les réductions, qui veut toujours des prix bas et des cadeaux au détriment d'autres idéaux ? Celui du consom'acteur qui s'attarde sur les étiquettes à la recherche de produits naturels, sains pour sa personne mais aussi respectueux de la planète et qui préfère regarder d'autres facteurs que la recherche du prix bas ? [...] 

Greenality sélection streetwear Hommes.

La symbolique de la marque ou "syndrome de l'étiquette"...

Revenons sur le segment de la mode éthique. Une question me vient à l'esprit, faisons nous partis de ces gens qui préfèrent payer plus cher pour porter une marque connue ? Oui ne nous leurrons pas il y'a des produits de grandes marques que vous devez acheter et dont le prix n'est pas à la hauteur de la qualité mais plutôt à la hauteur de votre perception de la marque. Porter telle marque, c'est un peu s'accorder une place privilégiée, on est fier de porter cette marque "X" et on appartient en quelques sortes à une tribu; on est "in", on est "branché". Et lors de ces achats, le prix est parfois (voire souvent) bien plus élevé qu'un produit mode éthique. Mais on ne critique pas ces grandes marques qui font payer le prix cher, car la demande est là... En outre, en termes de mode éthique, la tribu n'est pas encore assez forte; ce n'est pas aussi "in" de dire que je porte des vêtements d'un créateur "mode éthique" que de dire que j'ai le dernier top de la marque "X"... Alors sommes-nous prêts à devenir ces personnes qui préfèrent acheter, pour le même prix qu'une grande marque branchée, un article produit dans des conditions équitables, avec des matières naturelles et dans le respect de la nature et des hommes ? Payer plus cher pour se respecter et respecter la planète ne vaut-il pas le coup, si l'on s'attarde un peu à comparer nos différents achats ? 


Collection Linda Mai Phung.


Moi et mes achats / ma conscience...

Je n'ai peut-être pas les moyens d'éviter les grandes marques qui produisent en Asie et dont les collections ne sont pas naturelles; mais pour autant, je m'accorde parfois un joli cadeau avec un article de mode d'une grande marque, oui une de ces marques dont on rêve car elle est un peu une marque identitaire, dans laquelle on se reconnaît... Alors vais-je changer mes habitudes pour me faire un joli cadeau griffé par une marque Mode Ethique ? Cette question je pense que nous devrions toutes nous la poser... Attention, lorsque je parle Mode Ethique, je ne parle pas de Greenwashing. Je ne vais pas entrer dans ce débat du Greenwashing car sinon je vais écrire 10pages pour ce billet d'humeur; mais je précise que je parle des puristes de la Mode Ethique, ces créateurs dont la transparence est bien réelle... 


Collections L'Herbe rouge Copyright 


Un manque de choix et des articles pas tendances ?

Certaines d'entre vous vont aussi me dire qu'en ce qui concerne la Mode Ethique il y'a moins de choix, les articles ne plaisent pas toujours. Je suis d'avis pour dire qu'en effet les stylistes pourraient parfois un peu plus s'inspirer des tendances mode actuelles et je note tout de même que certaines marques ont fait des efforts ces dernières années. Vous voyez toutes les illustrations de cet article sont des photos tirées de sites de marques Mode Ethique qui ont de quoi (selon moi) rivaliser avec ces grandes marques pour lesquelles nous sommes déjà prêtes à payer le prix... Enfin, sans citer de marque, lorsque je parle de ces grandes marques qui nous vendent un basic à un prix assez voire très élevé, percevez-vous vraiment une plus value par rapport à un top très ressemblant griffé d'une autre marque et vendu bien moins cher ? Moi, avec un peu de recul je ne retrouve pas toujours de plus-value dans certains articles de ces grandes marques qui vendent très cher leur griffe et leur créations pas toujours originales... 

A très vite, 
So...

Commentaires

  1. eh bien moi j'ai craqué sur la petit robe noir elle est super jolie j'aime bcp.
    Et jsui d'accord certain vende des basic a des prix wouahh qui fond mal.

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    1. Oui et on est prête à acheter au prix fort ces grandes marques alors qu'il n'y a parfois rien de super et à côté de ça, pour les marques mode éthique, on hésite; ah la la... Après peut-être qu'il faudrait convaincre vraiment le grand public que les puristes de la mode éthique portent vraiment une grande attention au respect des préceptes du Commerce Equitable... Montrer en images, voire même en comparant avec "avant" "après" le commerce équitable...

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  2. Bravo pour ce joli article et votre défense de la mode éthique.
    Nous nous efforçons chaque jour de promouvoir les beaux articles issus du recyclage et de la mode éthique.
    http://www.monde-ethique.fr/

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    1. Merci je vais de ce pas découvrir votre site ! Bonne journée. Sonia

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  3. Bravo pour cet article et votre questionnement sur la mode éthique particulièrement intéressant en cette année de crise où plusieurs marques (éthiques ou pas) connaissent des difficultés financières importantes. Je vous partage quelques éléments de réflexion :

    * La mode n'est pas une vente de produit, mais une vente de valeurs.
    Lorsqu'on parle de mode, on ne parle pas -ou de manière très marginale- d'un produit avec une utilité fonctionnelle (quelque chose pour se protéger du froid ou de la pluie). On parle d'un "emballage" pour un être humain. Qui reflète, à travers des milliers de règles codifiées culturellement, ce qu'une personne pense d'elle-même et comment elle se situe dans la société.
    => A ce titre, les marques de mode éthique s'en sortent plutôt bien, car les valeurs véhiculées sont des valeurs fortes.

    * L'achat de mode est un achat émotionnel
    On choisit un vêtement avec son intelligence émotionnelle. Celle qui comprend les formes, les couleurs, les touchers... et tous les codes visuels que ces sens véhiculent. Cette intelligence qui permet de dire en une fraction de seconde "c'est pas pour moi" ou "ça ressemble à l'idée de moi que je recherche".
    On achète un vêtement parce qu'on "craque" émotionnellement pour un ensemble d'émotions positives. Le cerveau émotionnel fonctionne par l'attirance et l'association. La règle de base du marketing est d'associer un produit à ce qui attire (pourquoi y a-t-il toujours une très belle femme à proximité d'un produit vendu aux hommes ?)
    => A ce titre, les seules marques de mode éthique qui s'en sortent sont de véritables marques de mode, avec un véritable style et des valeurs susceptibles de faire "craquer"

    * La volonté d'éthique est au contraire le fruit d'un raisonnement rationnel
    On réfléchit aux problèmes d'éthique avec son intelligence rationnelle. Celle qui nous permet de comprendre les problèmes de substances chimiques toxiques, des conditions de travail dans le tiers-monde, etc.
    On décide d'une démarche éthique parce qu'on "refuse" de cautionner par son achat un ensemble d'éléments rationnels associés à des jugements négatifs. Le cerveau rationnel fonctionne par le rejet et la différentiation.
    => La clé du problème des marques de mode éthique est là: rien n'est moins sexy qu'un jugement rationnel. On ne peut pas "craquer" pour une absence de tel ou tel composé cancérigène. Personne ne veut acheter une robe sur laquelle il y aura marqué "en portant ce produit, vous réduisez le risque qu'un cultivateur de coton attrape un cancer car il n'aura pas utilisé de pesticide cancérigène". Le cerveau émotionnel fonctionne par association. S'il lit "cancer" sur une robe, il associe les deux, et il n'en veut plus.

    Le mot "commerce équitable" est associé à tout un tas de choses horribles "travail des enfants", "esclavage moderne" etc. qu'il entend combattre. émotionnellement, si je lis "commerce équitable" mon cerveau émotionnel y trouve -inconsciemment- un "répulsif marketing". Même si consciemment, je veux être un consomm'acteur, je cotise pour des ONG, etc.

    Toute la difficulté de la mode éthique est d'arriver à rendre émotionnellement attirant un ensemble de valeurs basées sur des critiques rationnelles anti-sexy. C'est comme pour vendre une assurance: ça parle de risques dont on n'a surtout pas envie d'entendre parler.

    Tout le paradoxe pour nous (les marques éthiques) est que nous voulons -et nous voulons- parler de ces problèmes pour les dénoncer et proposer une alternative, mais que nous devons éviter de saboter la magie positive de l'achat d'un vêtement par un excès de communication rationnelle négative.

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    1. Bonjour,
      Merci pour ces pistes de réflexions très constructives. Je suis diplômée en Marketing mais je ne suis pas une spécialiste ou une professionnelle de la mode éthique; néanmoins,je comprends votre point de vue et vous rejoins. La mode éthique fait face à une problématique que vous avez très bien expliqué. Je n'étais pas allé si loin dans ma réflexion. J'ai posé les questions que peut se poser n'importe quelle consommatrice sans aller au delà. Je dénonce un peu ce côté émotionnel, guidé par des codes sociétaires ou communautaires par exemple, et qui n'est pas encore assez mature (pour la plupart des clients potentiels) pour "craquer" sur un article mode éthique.
      En revanche, ce cerveau est complètement formaté pour acheter des articles basiques d'une marque de renom sans se soucier du prix qui est souvent le premier "coupable" en matière d'achats ces temps ci...

      Je pense que la mode éthique est encore un marché en développement. Ce nouveau concept devrait être de plus en plus intégré dans le futur et je le verrai même généralisé en termes de nouvelles pratiques du Commerce (mais c'est encore un peu utopiste car à ce jour la pratique est au Greenwashing et le consommateur a du mal à différencier les bonnes pratiques des pratiques mensongères ou abusives du fait d'un manque de transparence et d'un excédent de Marketing pour le greenwashing...) Le commerce équitable est selon moi comme une nouvelle "norme" qui devra entrer dans les moeurs avec le temps... Ou qui devra attendre que le consommateur soit assez mûr pour faire prévaloir la qualité, le développement durable à la quantité ou au prix bas.

      Selon moi, il faudra donc attendre que notre société de surconsommation et de masse tende à généraliser le commerce équitable; le but n'est-il pas simplement là? Ne plus faire de différence entre commerce et commerce équitable dans un futur lointain sûrement...(mais à la fois le plus proche possible serait mieux)... Faire du Commerce Equitable la "norme" et acheter peut-être plus cher mais plus intelligemment. Et lorsque je dis "intelligemment" je parle à la fois des préceptes du Commerce Equitable mais aussi du fait que nous, consommateurs, serions réduits à acheter ce dont nous avons besoin plutôt que d'amasser et de trop souvent gaspiller.
      J'apporte des réponses idéalistes je m'en rends compte mais j'espère qu'un jour ce paradoxe sera devenu une force et en tant que marketeur je vois ici un défi qu'il va falloir relever pour démocratiser la mode éthique...

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    2. Oui, bien sûr, on est tous d'accord sur le but ultime qui consiste à ce que l'éthique et le bio devienne la norme et que le reste devienne l'exception.

      En revanche, si j'ai autrefois partagé votre avis, je ne le partage plus lorsque vous dites "Je dénonce un peu ce côté émotionnel, guidé par des codes sociétaires ou communautaires [...]".
      La mode, au delà du vêtement, est sans doute le meilleur critère pour différentier l'Homme de l'animal. Il est consubstantiel de notre caractère d'"animal social"

      Si l'on rationalisait l'achat de vêtement, alors nul besoin de changements de couleurs et de formes et chacun porterait la même soutane. C'est le but de l'uniforme: faire disparaître l'individu derrière le collectif.

      La mode par essence, s'adresse à notre perception de soi-même et à notre relation aux autres. La première chose (et bien souvent la seule) que l'on voit d'une personne, c'est bien son vêtement. C'est bien cette fonction de "support de codes" portant sur des champs aussi variés que nos interactions sociales, qui donne son sens à la mode.

      Lorsqu'on choisit un vêtement, on choisit l'emballage dans lequel on choisit de se présenter. On pense au contexte dans lequel on va porter le vêtement, aux personnes qui vont y chercher divers codes, à l'image de soi-même que l'on va se donner...
      Seul notre cerveau émotionnel est capable de gérer correctement ce type de complexité. Lui seul sait reconnaître des codes dont on n'a pas seulement conscience qu'ils existent, et que notre cerveau rationnel serait bien en peine de gérer...

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